Enlèvement d’une petite fille à Dunkerque : L’importance du droit à l’oubli soulignée après la diffusion de l’alerte sur internet.

Il est 10h14 ce jeudi quand Chloé* reçoit un message d’une amie. Cette dernière lui demande de partager l’alerte d’enlèvement concernant une petite fille de 8 ans, kidnappée par son père. La nuit précédente, à Dunkerque (Nord), la fillette avait disparu et sa mère avait été retrouvée sans vie. Chloé* fait ce qui lui est demandé et partage rapidement l’alerte d’enlèvement sur sa story Instagram. Ce n’est qu’une action qui ne prend que quelques instants, mais peut aider grandement.

Deux heures plus tard, la procédure d’Alerte-Enlèvement déclenchée la veille est arrêtée, mais l’enfant est toujours portée disparue. Cela amène Chloé* à se poser une question supplémentaire : Si l’avis de recherche n’est plus en vigueur, faut-il supprimer tous les partages sur les réseaux sociaux ?

Une démarche qui n'est pas toujours à l'avantage de la victime

Il est évident que ce jeudi, les autorités et certains internautes n’étaient pas sur la même longueur d’onde concernant cette question. Sur Twitter, par exemple, les partages continuent malgré le retrait de la publication par les autorités. “L’alerte est levée, mais nous ne devons pas arrêter de partager. S’il vous plaît, partagez, partagez!” peut-on lire sur un tweet accompagné d’une photo de la petite fille et d’une description. “Nous vous demandons de retweeter autant que possible les tweets relatifs à cet enlèvement pour augmenter les chances de retrouver cette petite!”, supplie un autre utilisateur à 16 heures, soit quatre heures après la fin de l’alerte.

Cependant, le ministère de la Justice intervient rapidement. En réponse à de nombreuses publications relayant l’alerte d’enlèvement, le compte Twitter de l’institution rappelle : “Pour le droit de l’enfant à la protection et au droit à l’oubli, merci de supprimer toutes les publications”. Sur son site, le ministère de la Justice ajoute que partager une alerte d’enlèvement est une “démarche louable”, mais “à long terme, cette action n’est pas toujours à l’avantage de la victime”. “Après la fin de l’alerte, ces données restent généralement stockées sur les sites Internet ou référencées dans les moteurs de recherche”, précise le ministère.

De plus, le ministère insiste sur le fait qu’il est de sa responsabilité de “contrôler les images et les données nominatives qui seront diffusées à la population”. “En particulier, il doit être capable de mettre fin à la diffusion de ces éléments. Après la fin de l’alerte, les entités qui continuent à diffuser ces informations assument seules la responsabilité éditoriale”, précise le site du ministère de la Justice.

Sollicitation de divers relais

Depuis 2006, année de création du dispositif “Alerte enlèvement”, une convention détaille ses règles, notamment concernant le numérique. Elle détaille notamment les organismes contactés par l’autorité judiciaire. Parmi eux, on compte les agences de presse, les chaînes de télévision, les stations de radio, les associations de victimes et d’aide aux victimes, les gestionnaires de réseaux routiers et les sociétés de transport.

“L’alerte prend fin trois heures après que les organismes désignés ont été informés du déclenchement de l’alerte, même si la victime et le suspect n’ont pas été retrouvés”, précise l’article 10.

Prioriser la publication des autorités

Sur les réseaux sociaux, les internautes sont libres de partager les alertes pour augmenter les chances de retrouver l’enfant disparu. Plusieurs détails sont disponibles : la date et le lieu de l’enlèvement, la description du véhicule et le numéro d’immatriculation, une photo de la victime, ainsi que celle du suspect. Cependant, une fois l’alerte levée, ces informations ne doivent plus apparaître en ligne… toujours dans le respect du droit à l’oubli. Il est donc important de prêter attention à la manière dont on partage ces alertes.

Finalement, la meilleure pratique serait de relayer directement la publication des autorités, ou d’une agence de presse. Au moment de la levée de l’alerte, la photo et l’identité de la fillette disparue disparaissent simultanément. Si la photo a été publiée directement depuis votre compte, il faudra alors veiller à sa suppression rapide après la levée de l’alerte.

*le prénom a été modifié